Le Mercredi 11 juin 2008
Recours juridique concernant l’autoroute 25
publié par Conseil régional de l’environnement de MontréalMONTREAL, le 11 juin – Après avoir pris connaissance du jugement rendu le 9 juin 2008 (500-17-0340-064) par le juge Pierre Béliveau de la Cour Supérieure du Québec concernant l’illégalité des décrets gouvernementaux autorisant le prolongement de l’autoroute 25, le Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal), Equiterre et Greenpeace s’expliquent mal la décision du juge qu’il leur apparaît ignorer l’esprit et la finalité de la Loi sur la qualité de l’environnement et ne pas tenir compte de l’ensemble de la preuve. A leur avis, la preuve démontre clairement que la nouvelle démarche mise en place par le Gouvernement du Québec dans le cadre des partenariats public-privé (PPP) a permis de soustraire des pans complets du projet et de ses impacts environnementaux des audiences publiques du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Pour les demandeurs, le jugement de la Cour supérieure permet
l’amendement effectif de notre processus d’évaluation publique des impacts par fiat du Conseil des ministres plutôt que par la voie démocratique, soit l’amendement de la loi par l’Assemblée nationale.
Un juge insensible aux conclusions du BAPE et des spécialistes du MDDEP
Le juge s’est montré insensible selon eux aux conclusions du rapport du BAPE sur le prolongement de l’autoroute 25. En effet, les commissaires du BAPE avaient, dans leurs conclusions, clairement affirmé que l’étude d’impact avait pris une facture allégée quant aux exigences de la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement, car le ministère des Transports souhaite donner une latitude maximale à l’éventuel concessionnaire. A ce sujet, la Commission était d’avis que l’étude d’impact aurait due être réalisée indépendamment du fait qu’il s’agisse ou non d’un PPP. L’étude d’impact devrait toujours présenter l’information sur les impacts et sur les mesures d’atténuation proposées pour permettre au public, au Ministère du
Développement Durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) ainsi qu’au BAPE d’évaluer l’acceptabilité des différents aspects du projet.
Pourtant, dans son jugement, le juge Béliveau reconnaît que même si le processus prévu à l’article 31.3 n’est rien de plus qu’une consultation, la Cour est disposée à accepter que celle-ci (l’étude d’impact et audience
publique) ne saurait être complètement vidée de substance (ligne 114). Or selon les demandeurs, la preuve soumise démontre clairement que le MTQ n’a jamais été en mesure, en l’absence du futur partenaire privé, de répondre adéquatement à toutes les questions concernant le type de pont, les méthodes de construction, les solutions alternatives et les ouvrages temporaires (remblais, déblais, méthode de dragage, travaux en rives, etc.). Tout au plus, ce dernier a-t-il fait état d’hypothèses ou de scénarios. Le juge s’est également montré insensible à l’avis des nombreux fonctionnaires du MDDEP et des autres ministères qui ont exprimé leur malaise, soit directement au moment des audiences du BAPE ou encore dans des avis subséquents, soulignant qu’il s’agissait là d’un précédent qui rendait difficile, voire même impossible, de faire une analyse adéquate des impacts environnementaux. Le juge a donc décidé d’ignorer complètement le point de vue de plusieurs spécialistes du MDDEP, pourtant mentionné dans le jugement lui-même, à la page 7 : Reporter le choix de l’ouvrage (pont), l’évaluation des impacts, le choix de la méthode de travail, le choix des mesures d’atténuation et compensatoires à une étape ultérieure rend le processus insignifiant, voire inutile. Pas étonnant dans ce contexte qu’il n’y ait pas eu l’analyse de rapport d’analyse environnementale habituelle en pareil cas, le ministre et le gouvernement se contentant d’une «analyse verbale».
Des écologistes inquiets pour la démocratie et la protection de l’environnement
André Porlier, directeur général du CRE-Montréal s’interroge : «Doit-on comprendre que dorénavant le Gouvernement du Québec possède un pouvoir discrétionnaire illimité en matière d’étude d’impact et d’audiences publiques en environnement ? Il s’agirait là d’un recul évident pour l’exercice démocratique de la protection de l’environnement. Nous croyons, bien au contraire, que la preuve a été faite que le Gouvernement du Québec a largement dépassé la limite du contenu minimum pour assurer un processus utile et légitime.»
Pour Steven Guilbeault d’Equiterre «le juge Béliveau réduit tout le processus d’évaluation environnemental à un exercice de style vide de sens et de contenu et le processus de consultation publique, à une simple soupape
sociale».
De plus, les écologistes considèrent que la décision du juge, dans une cause d’intérêt public, sur une problématique environnementale liées aux PPP de condamner des organismes avec peu de ressources financières, à payer les dépens du gouvernement, du concessionnaire privé et de leurs alliés, constitue une entrave à l’exercice de droits pourtant prévus dans la loi sur la qualité de l’environnement.
Les trois organismes se donnent encore quelques jours pour étudier la possibilité d’aller en appel et surtout pour trouver les fonds nécessaires pour le faire.
Renseignements:
Matthieu Leclerc, CRE-Montréal,
(514) 842-2890 poste 226, cell: (514) 717-5699;
Marie-Eve Roy, Equiterre,
(514) 522-2000, poste 232, cell: (514) 378-0232;