Le Lundi 2 juin 2014
Le stress maternel prénatal à l’origine de traits autistiques et asthmatiques chez les enfants de 6 ans et demi : le Projet Verglas
publié par Institut universitaire en santé mentale DouglasMONTRÉAL, le 2 juin 2014 – Une nouvelle étude constate un lien entre le stress maternel prénatal (SMP) et l’apparition de symptômes d’asthme et d’autisme chez les enfants.
Une équipe de chercheurs de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas et de l’Université McGill a suivi, à partir de juin 1998, des femmes qui étaient enceintes au moment de la tempête de verglas de janvier 1998 au Québec, afin d’observer les effets de leur stress sur le développement de leurs enfants (Projet Verglas). L’équipe a examiné dans quelle mesure les différents niveaux de difficultés objectives des mères dues à la tempête et niveaux d’anxiété subjective justifiaient les différences entre les degrés d’intensité des symptômes asthmatiformes et des traits autistiques de leurs enfants.
Les résultats, publiés dans le magazine Psychiatry Research, montrent que plus haut était le niveau de difficultés objectives des mères à la suite de la tempête de verglas (notamment de nombreux jours sans électricité), plus forte était l’anxiété des mères occasionnée par la tempête 5 mois plus tard, et plus sévères étaient les traits autistiques que présentaient leurs enfants à l’âge de 6 ans et demi.
L’équipe insiste sur le fait que les enfants du Projet Verglas ne sont pas autistes; les résultats montrent des variations normales d’un enfant à l’autre.
Un enfant qui présente des traits autistiques a notamment des difficultés à se faire des amis, est maladroit, parle de manière étrange, etc. Les effets du stress des mères dû à la tempête de verglas étaient particulièrement marqués chez celles qui étaient dans leur premier trimestre de grossesse au moment de la tempête. Fait intéressant, les enfants qui présentaient les symptômes les plus sévères étaient ceux dont les mères avaient vécu un niveau élevé de difficultés dues à la tempête de verglas, mais qui avaient un niveau bas d’anxiété.
« Nous avons constaté que les difficultés objectives des mères occasionnées par la tempête de verglas (telles que le nombre de jours sans électricité) ou leur niveau d’anxiété provoquée par la tempête avaient eu des effets sur chaque aspect du développement des enfants que nous avons observés, a dit l’auteure principale de la publication, Suzanne King, PhD. C’est surprenant, car les enfants qui ont participé à notre étude sont issus pour la plupart de familles de la classe supérieure et réussissent extrêmement bien à l’école et dans la vie. »
En mai, l’équipe a publié un rapport dans le magazine Biomedical Research International qui montre que les filles dont les mères avaient de hauts niveaux d’anxiété après la tempête de verglas étaient plus susceptibles d’avoir eu des épisodes de respiration sifflante, d’avoir reçu un diagnostic médical d’asthme et des prescriptions de médicaments pour l’asthme avant l’âge de 12 ans. Aucun effet n’a été constaté chez les garçons, et il n’y avait aucun effet dû aux difficultés objectives des mères.
Ces résultats montrent la capacité qu’a un facteur de stress pendant la grossesse d’influencer tant le développement physique que la santé mentale de l’enfant à naître. Le Projet Verglas continue de suivre le développement des enfants, notamment au moyen d’IRM du cerveau à 16 ans, qui seront effectuées à partir de septembre.
« Si le stress de la tempête de verglas a pu avoir autant d’effets sur ces enfants, permettant d’expliquer pourquoi certains étaient plus atteints que d’autres ou avaient un développement plus atypique que les autres, a ajouté Suzanne King, quelles proportions pourraient prendre les effets d’un événement encore plus stressant vécu pendant la grossesse ou dans les familles défavorisées qui ont peu de ressources? Notre recherche nous montre à quel point l’enfant à naître est vulnérable à l’humeur de sa mère et à l’environnement dans lequel elle vit. »
Le Projet Verglas
Quand la tempête de verglas de janvier 1998 a plongé dans le noir plus de 3 millions de Québécois pendant 45 jours, l’équipe de chercheurs a profité de l’occasion pour étudier les effets du stress sur les femmes enceintes, sur leur grossesse et sur leur enfant à naître. Elle a suivi un groupe de 150 familles dont la maman était enceinte pendant la tempête de verglas ou est tombée enceinte peu après, dans le but d’observer les effets immédiats de différents niveaux et types de stress sur l’enfant à naître. L’équipe continue de suivre ces enfants, qui sont aujourd’hui des adolescents.
L’équipe de chercheurs qui a mené cette étude est composée de Suzanne King et Alain Brunet de la Division de recherche psychosociale de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas et du Département de psychiatrie (faculté de médecine) de l’Université McGill, ainsi que de David P Laplante, également de l’Institut Douglas. Les résultats de ces travaux ont été publiés dans le Biomedical Research International (asthme, 8 mai) et le Psychiatry Research (autisme, juin).
Le projet est soutenu par Les Instituts de recherche en santé du Canada.
À propos de l’Institut Douglas – www.douglas.qc.ca
Le Douglas est un institut de renommée mondiale affilié à l’Université McGill et à l’Organisation mondiale de la santé. Il a pour mandat de soigner des personnes atteintes de maladie mentale en leur offrant espoir et guérison. Les équipes de spécialistes et de chercheurs de l’Institut font continuellement avancer les connaissances scientifiques, les intègrent aux soins des patients et les partagent avec la communauté en vue d’accroître la sensibilisation et de mettre un terme aux stigmas entourant la maladie mentale.