Le Jeudi 27 février 2014
Des chercheurs de Montréal trouvent un lien entre les polluants et certaines complications de l’obésité
publié par Institut de recherches cliniques de Montréal IRCMCette percée pourrait éventuellement aider à améliorer la prévention, le diagnostic et le traitement de complications métaboliques associées à l’obésité
MONTRÉAL, le 27 févr. 2014 – Une équipe de chercheurs de l’IRCM à Montréal dirigée par Rémi Rabasa-Lhoret, en collaboration avec Jérôme Ruzzin de l’Université de Bergen en Norvège, a trouvé un lien entre un type de polluants et certaines complications métaboliques de l’obésité. Cette percée, publiée en ligne cette semaine par The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism, pourrait éventuellement contribuer à l’amélioration de la prévention, du diagnostic et du traitement des risques cardiométaboliques associés à l’obésité, comme le diabète, l’hypertension et les maladies cardiovasculaires.
Bien que l’obésité soit fortement associée à la résistance à l’insuline et au diabète de type 2, une sous-population d’individus obèses, nommée « obèses mais métaboliquement sains », semble être relativement protégée de telles complications cardiométaboliques. Les chercheurs de l’IRCM étudient les facteurs qui pourraient protéger les personnes obèses qui sont métaboliquement saines, afin de trouver des pistes thérapeutiques pour prévenir les complications pour d’autres personnes qui sont à risque.
« Dernièrement, il a été démontré que les polluants organiques persistants (POP) accélèrent le développement du prédiabète et de l’obésité chez la souris, imitant ainsi le profil cardiométabolique défavorable qui caractérise certaines personnes obèses. Le but de notre étude était donc de vérifier si les individus obèses mais métaboliquement sains ont des taux circulants de POP plus faibles que les personnes obèses avec des complications cardiométaboliques » a dit Rémi Rabasa-Lhoret, M.D., Ph. D., endocrinologue et directeur de l’unité de recherche sur les maladies métaboliques à l’IRCM.
Les polluants organiques persistants sont des produits chimiques fabriqués par l’humain qui sont utilisés dans des procédés agricoles, industriels et manufacturiers. En raison de leur toxicité, les POP ont été strictement règlementés sur la scène internationale pour assurer la santé publique. Étant donné qu’ils ont la capacité de résister à la dégradation environnementale, les POP se retrouvent encore à travers le monde, même dans des endroits où ils n’ont jamais été utilisés, et demeurent omniprésents dans notre environnement et nos produits alimentaires. Ainsi, presque tous les êtres humains sont exposés aux POP quotidiennement.
« L’exposition aux POP provient principalement de l’environnement et de la consommation d’aliments comme les poissons gras, la viande et les produits laitiers. Une caractéristique importante des POP est leur solubilité dans les lipides, c’est-à-dire qu’ils s’accumulent dans les tissus adipeux (gras) de l’organisme. Comme leur nom l’indique, ils sont aussi persistants, donc le corps peut difficilement les éliminer. Les POP peuvent donc avoir un impact important sur la santé humaine et il a été démontré qu’ils ont un effet sur la reproduction, qu’ils favorisent le cancer et qu’ils sont impliqués dans le développement de maladies métaboliques » a expliqué Jérôme Ruzzin, Ph. D., un expert dans le domaine de la recherche sur les POP.
Les chercheurs de l’IRCM ont mené une étude auprès de 76 femmes obèses ayant un profil semblable sur les plans de l’âge, de l’indice de masse corporelle et de l’indice de masse grasse, lors de laquelle ils ont analysé la concentration de 21 POP ainsi que des facteurs de risque cardiométabolique. Parmi les 18 polluants détectables, les femmes présentant des complications cardiométaboliques avaient des niveaux élevés de 12 POP.
« Les niveaux de près de 70 % des POP détectables étaient considérablement plus élevés chez les personnes obèses avec des complications cardiométaboliques comparativement aux sujets obèses mais métaboliquement sains, ce qui est remarquable. Notre étude confirme que les deux groupes ont des profils POP très distincts et que les personnes obèses qui sont métaboliquement saines ont des taux circulants de POP beaucoup plus faibles que les patients souffrant de complications. Une meilleure compréhension du rôle des POP pourrait mener vers de nouvelles avenues pour la prévention, le diagnostic et le traitement de risques cardiométaboliques associés à l’obésité » a ajouté Marie-Soleil Gauthier, Ph. D., co-première auteure de l’étude et chercheuse associée à l’IRCM.
« Bien que cette étude ne démontre pas un lien de cause à effet, elle suggère que des polluants abondants dans notre environnement pourraient favoriser l’apparition de maladies cardiométaboliques comme le diabète. Si les études futures confirment ce risque élevé, de telles observations auront un grand impact sur les décisions de santé publique car il faudra réduire de façon très importante l’exposition à ces polluants » a conclu le Dr Rabasa-Lhoret.
À propos de l’étude
Les travaux menés à l’IRCM ont été appuyés par la Chaire J.A. DeSève en recherche clinique, le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS) et l’Association Canadienne du Diabète.
Pour plus d’information, veuillez consulter l’article publié en ligne par The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism : http://press.endocrine.org/doi/abs/10.1210/jc.2013-3935.
À propos du Dr Rémi Rabasa-Lhoret
Rémi Rabasa-Lhoret a complété sa formation médicale (M.D.) avec une spécialisation en endocrinologie, métabolisme et nutrition à l’Université Montpellier en France. Il a obtenu un doctorat en sciences de l’alimentation et a complété un stage postdoctoral en physiologie et biologie moléculaire. À l’IRCM, le Dr Rabasa-Lhoret est directeur de l’unité de recherche sur les maladies métaboliques, de la clinique en diabète, métabolisme et obésité et de la plateforme de recherche en obésité, métabolisme et diabète. Il est professeur agrégé au Département de nutrition de l’Université de Montréal. Il est aussi professeur associé au Département de médecine (Division de la médecine expérimentale) de l’Université McGill. Le Dr Rabasa-Lhoret est chercheur-boursier clinicien du Fonds de recherche du Québec – Santé et détient la Chaire J.A. DeSève en recherche clinique. Pour plus d’information, visitez le www.ircm.qc.ca/rabasa.
À propos de l’IRCM
Créé en 1967, l’Institut de recherches cliniques de Montréal (www.ircm.qc.ca) regroupe aujourd’hui 35 unités de recherche spécialisées dans des domaines aussi variés que l’immunité et les infections virales, les maladies cardiovasculaires et métaboliques, le cancer et les maladies génétiques, la neurobiologie et le développement, la biologie intégrative des systèmes et la chimie médicinale, et la recherche clinique. Il compte aussi quatre cliniques spécialisées, huit plateaux technologiques et trois plateformes de recherche dotées d’équipement à la fine pointe de la technologie. Plus de 425 personnes y travaillent. L’IRCM est une institution autonome affiliée à l’Université de Montréal et sa clinique est associée au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). L’Institut entretient également une association de longue date avec l’Université McGill. L’IRCM est financé par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie du Québec.