Journée mondiale de l’habitat
Des actions partout à travers le monde pour réclamer le plein exercice du droit au logement
Serge Lachapelle
À l’occasion de la Journée mondiale de l’habitat le 4 octobre, des actions se sont tenues partout à travers le monde pour réclamer le plein exercice du droit au logement. La lutte inlassable des activistes qui bénéficie de l’appui de la population a mis à l’ordre du jour le plein exercice du droit au logement qui exigent des mesures concrètes comme l’instauration du contrôle des loyers, la protection du parc de logements locatifs en empêchant la transformation de logements en condos, l’amélioration du programme d’allocation-logement, la modification du code du bâtiment pour que les normes d’insonorisation soient plus élevées, ce qui rendrait la présence d’enfants dans les logements moins « problématique», l’inclusion d’une reconnaissance du droit au logement dans les chartes québécoise et canadienne.
Au Québec, le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) a organisé en matinée un rassemblement bruyant devant l’hôtel des Seigneurs à Saint-Hyacinthe où se tenaient les Rendez-vous de l’habitation.
« Pour garantir le droit fondamental au logement, le gouvernement a l’obligation de protéger les locataires contre les hausses abusives de loyers » a déclaré France Emond, porte-parole du RCLALQ. Le RCLALQ a profité de l’occasion pour rappeler au ministre Lessard, ministre responsable de l’habitation que le loyer est la dépense principale d’un ménage locataire. Les loyers ont augmenté de 145$ entre 2000 et 2009, soit une hausse de 29%. Le nombre de locataires qui déboursent plus de 30% de leurs revenus pour se loger se chiffrait à 448 840 selon les dernières données de Statistiques Canada.
Pour permettre aux locataires d’exercer leur droit, le RCLALQ réclame un registre des baux. Une pétition de plus de 12000 signataires a été déposée en juin dernier à l’Assemblée nationale pour revendiquer un tel registre. Près de 300 organisations communautaires ont demandé au gouvernement d’instaurer ce registre. Enfin, 31 députéEs au Québec ont appuyé la revendication du RCLALQ. Notons également qu’Amir Kadhir, chef de Québec solidaire, Richard Bergeron, chef de Projet Montréal appuient avec d’autres députéEs du Bloc québécois cette demande.
« Du point de vue technologique, ce serait facile à instaurer, ça ne coûterait pas très cher et les locataires disposeraient d’un outil pour faire respecter leur droit » a affirmé madame Emond. En cette journée mondiale de l’habitat, les locataires attendent un engagement clair du gouvernement : un registre des baux pour faire respecter le Code civil! Tel est le message que les locataires sont venus porter à monsieur Lessard.
Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) a profité quant à lui de cette journée pour procéder au lancement à Québec du document Femmes, logement et pauvreté: Sortir du privé, un enjeu de société. Le document fait suite à une vaste tournée d’ateliers tenue à l’hiver 2010, dans les villes de Québec dont les quartiers Sainte-Foy, Saint-Jean-Baptiste et Saint-Sauveur, réunissant des femmes locataires de divers horizons.
Selon le FRAPRU, les femmes sont doublement touchées par les conséquences de la pénurie de logements locatifs qui affecte la ville de Québec depuis près d’une décennie.
Organisatrice au FRAPRU, Véronique Laflamme explique : « Plus pauvres pour se payer des logements rarissimes, les femmes sont plus nombreuses à consacrer une part exorbitante de leur revenu au logement. C’est le cas de quatre ménages locataires féminins sur dix. Il faut savoir que le revenu médian des femmes locataires à Québec est de 26 524 $ contre 34 019 $ pour les hommes locataires. De plus, les femmes sont plus nombreuses à être locataires ».
La rareté des logements dans la région est par ailleurs propice à la discrimination dont sont notamment victimes les mères de famille, les personnes immigrantes et les personnes à l’aide sociale. À Québec, comme dans toutes les autres villes, des mères de familles affirment vivre une discrimination reliée à la présence d’enfants. Cette donnée difficilement quantifiable inquiète le FRAPRU. La pénurie a aussi des effets particulièrement dramatiques pour les femmes victimes de violence conjugale. Certaines se maintiennent dans des situations de violence faute de pouvoir en sortir. Des femmes hébergées dans des maisons d’hébergement ne peuvent en sortir parce qu’elles ne trouvent pas un logement convenable à un prix qu’elles puissent payer. De plus en plus de femmes vivent l’itinérance.
« Notre constat est que le marché privé ne permet pas de répondre aux besoins et qu’on ne peut compter sur lui pour faire respecter un droit que toute la société s’en engagée à respecter », conclut Véronique Laflamme. Pour répondre aux besoins les plus urgents, le FRAPRU revendique 50 000 nouveaux logements sociaux en cinq ans. Il estime toutefois que, pour lutter efficacement contre la pauvreté, le gouvernement doit aussi assurer à toutes un revenu décent, ce qui implique l’augmentation de l’aide sociale en mettant fin aux catégories entre aptes et inaptes, de même que l’accroissement du salaire minimum. La Marche mondiale des femmes de 2010 a d’ailleurs identifié ces deux revendications comme des mesures urgentes.
Source: Communiqués du RCLALQ et du FRAPRU